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Un passé, un regard, un échange

Distillerie

 La distillerie coopérative  route de

  Capestang 

Dès le début des années 50, Henri trouve un emploi de comptable à la distillerie, route de Capestang, qu'il ne quittera qu'à l'âge de la retraite. Une manière aussi de rester fidèle à son quartier. Durant tout ce temps, il a pu mesurer la transformation des conditions de travail qui inexorablement accompagnent le modernisme mais encore les conséquences de la crise viticole.«La distillerie coopérative était à cette époque, l'une des plus importantes d'Europe et présentait pour les habitants du Faubourg une chance inestimable d'obtenir leur gagne pain à proximité du domicile. 50 emplois répartis en 45 ouvriers manutentionnaires et 5 bureaucrates,dont 2 secrétaires, 1 comptable en charge du personnel, 1 autre pour la matière et une standardiste. Le directeur et le contremaître avaient leurs appartements privés sur place. En période de vendanges, on embauchait 60 autres travailleurs dont certains, employés à la SNCF ou à la Mairie, prenaient leurs congés annuels pour percevoir un complément de revenus.»Les activités dans la distillerie s'échelonnaient à partir de la réception du marc de raisin. «Au départ, les vignerons amenaient leur marc dans des charettes-tombereaux tirées par des chevaux qui dérapaient parfois sur les traverses de la bascule utilisée pour la pesée. Plus tard viendra l'âge d'or des transporteurs privés qui assureront directement les collectes avec leurs camions depuis les propriétés vers notre dépôt» Venaient ensuite la fabrication des piquettes "un procédé consistant à ajouter de l'eau et des levures au marc pour le faire fermenter et en extraire ainsi l'alcool"; les distillations et l'extraction des pépins de raisin pour la fabrication des huiles. "Une huilerie traitait les pépins sur la zone de Béziers, l'excédant allait en Italie"La surproduction ayant entraîné une grave crise viticole, après la distillation obligatoire, qui imposait aux vignerons de transformer leurs surplus vinique en alcool, l'Etat subventionna la distillation volontaire pour les hectolitres invendus. "On avait des problèmes de stockage ce qui conduisait à remplir des wagons sncf acheminés vers Narbonne et cantonnés en attendant d'être utilisés!" Les vins languedociens de faible degré (entre 8 et 10°) étaient coupés avec ceux de meilleure qualité provenant d'Algérie et exportés en masse, enrichissant les négociants. L'indépendance algérienne de 1962 marque le coup d'arrêt de cette pratique et signe le départ de la décadence des vignobles languedociens. La prime à l'arrachage libère de nombreux terrains et précipite le déclin de la distillerie.

" Outre ces activités, les lies de vin servaient à la fabrication d'acide tartrique. A partir de matières premières telles les phosphates, nitrates ou azote, la distillerie produisait des engrais revendus aux viticulteurs."

Avec une pointe de fierté et un zeste d'affection, Henri revient sur son métier, les difficultés particulières qui caractérisent les professions basées sur la maîtrise des chiffres: "J'établissais les fiches de paie à la main puis préparais les enveloppes individuelles dans lesquelles j'introduisais l'argent en espèce, pièces et billets, qu'au préalable il m'avait fallu soigneusement prévoir. La moindre erreur dans la répartition, le ridicule petit centime manquant ou en trop m'occasionnait de cruelles insomnies qui ne s'évaporaient lorsque j'en décelais l'origine!...Pendant la saison des vendanges, en plus de l'augmentation du personnel, les salaires devaient être versés chaque semaine!" L'apparition de l'informatique et la mise à disposition de son matériel, en 1972, par son employeur, simplifie peu à peu la tâche mais l'adaptation ne se fait pas du jour au lendemain " Le Burrous était un ordinateur imposant de plus de 1 mètre de large et de haut! Il fonctionnait lentement, à l'aide de bandes perforées et la sauvegarde des données était bien compliquée. Un écart de manipulation et c'était la catastrophe! Cependant, des fiches cartonnées pré-établies et introduites ensuite dans la machine allégèrent de manière conséquente l' exercice d'écriture".

 

Comme pour en effacer les contrariétés et conclure sur une note optimiste, Henri ajoute: "J'avais mission d'organiser, une fois l'an, un repas pour tout le personnel. Afin de garantir son financement, avec l'accord des ouvriers, je prélevais à chacune paie une faible somme d'argent qui alimentait la caisse de prévoyance; la direction de la distillerie en versait aussi une part. Entre nous, l'ambiance était excellente, notre solidarité faisait merveille

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